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n’avait pas oublié. Pour cela, et avec une ironique vérité, Louise avait dit l’aimer aussi.

Le médecin, soudain, lut la cruauté hostile sur le beau visage clos. Il comprit que la lutte tournait à son avantage et il se sentit vaincu par son succès. Il chuchota en hâte :

— J’ai oublié déjà. Je ne m’en souviendrai jamais. Ah ! Louise, je regrette de vous avoir dit cela, et mon regret doit m’absoudre, car dans cette lutte entre nos deux orgueils je vous rends les armes.

Elle se tut. Il reprit :

— Je ne vous ai jamais oubliée. Depuis trois ans je pense à vous, Louise. C’en est devenu un cauchemar. Je ne peux plus vivre sans vous. Votre ombre hante mes nuits et mes jours. Vous me possédez comme jamais magnétiseur n’a possédé sa victime ; je vous adore, soyez à moi.

Elle se tut encore. Il prit cela pour une acceptation et son cœur s’emplit d’un bonheur énorme. Il crut tomber, tant la félicité absorbait d’un coup les forces de son être.

— Louise ?

Elle le regarda.

Ah ! ces yeux larges sous lesquels passait une large touche de bistre, ces joues roses et mates, ces épaules arrondies dont il entrevoyait les ondulations harmonieuses, et tout ce corps qu’il devinait rénové du jour où il lui appartiendrait !

— Vous consentez, Louise ? Je suis humble, je vous veux. Je ne puis croire que rien nous sépare. Louise, dites-moi oui ?

Elle se pencha vers l’homme qui la suppliait, et son sourire était un ensorcellement. Sa cape s’ouvrit un peu, en même temps, et il vit la naissance de la gorge. Il connut un désir immense et douloureux de tenir cela dans ses bras, tout de suite…