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De Laize monta un escalier tendu de violet clair. Une odeur suffocante de parfums, où dominait la senteur âcre des muscs et l’arôme lourd des essences de rose, flottait dans l’air.

— Bonjour, docteur !

Une grande femme, vêtue d’une longue cape noire descendant jusqu’aux pieds, arrêta de Laize à l’entrée de la salle de Phallos. Elle apparaissait somptueusement belle, d’une beauté travaillée et savante, où les fards et les teintures avaient leur part, et le travail des masseuses et le hammam, et des soins infinis. Mais cela, sous la lumière des arcs, constituait la plus émouvante des beautés, une beauté que l’on devinait fragile, attirante pourtant et dont le charme ne s’oubliait plus.

— Bonjour, ma chère amie.

La voix de Jacques tremblait, parce que son passage de la science à la volupté se faisait trop brutalement et que, de l’idée pure, il tombait sur la femme qu’il avait le plus désirée et le plus difficilement conquise : la comtesse Thea Racovitza.

— Vous n’avez pas honte, vous, un grand médecin dont les minutes de jour et de nuit devraient être dévouées aux douleurs humaines, de venir traîner en ce lieu de perdition ?

Il la regarda avec hauteur :

— M’occupais-je, ma chère Thea, si de jour et de nuit vous avez une profession secrète à laquelle vous vous devez toute ?

Elle devint écarlate. Le regard fixe du docteur pesait sur ses paupières larges qui battaient nerveusement. C’est que le médecin n’ignorait point que Thea Racovitza, maîtresse d’un ancien président du Conseil, était une espionne au service de l’Angleterre.

Elle se remit et, avec l’air d’une chatte énervée, murmura :

— Chut, voyons ! Vous allez répandre mes secrets…