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VENGEANCE FATALE

mais c’est un fort joli endroit. Un de ses principaux agréments consiste dans la rivière Richelieu qui coule à ses pieds ; il y aussi la vue du Mont St-Hilaire, très souvent témoin de nombreux voyages de plaisir. C’est véritablement un magnifique panorama qui se déroule à vos yeux, et vous reconnaissez en même temps l’une des plus belles localités de la province de Québec, surtout pour les personnes qui vont passer à la campagne la saison d’été.

En commençant ce récit, nous disions que le mois d’avril touchait à sa fin.

Par une belle matinée de ce mois, vers dix heures, une jeune fille de dix-sept à dix-huit ans sortait de chez elle pour se rendre à un magasin du village, peu éloigné de sa demeure. Elle était très jolie et, quoique vêtue très simplement selon la coutume générale de la campagne, elle avait une figure maligne et gentille à la fois, qui lui donnait une beauté qu’on pourrait appeler printanière. Aussi depuis longtemps, captivait-elle tous les regards, non seulement des jeunes gens de sa place natale, mais surtout des étrangers qui venaient à St-Antoine pour y passer la belle saison.

Mathilde Gagnon, nous ne tairons pas son nom plus longtemps, était la fille d’un riche cultivateur possédant, sans contredit, la plus belle terre de St-Antoine, à l’exception de celle de son voisin Joseph Hervart.

Pour se rendre au magasin dont nous venons de parler, elle devait passer devant la propriété de M. Hervart. Or, sur cette terre, depuis l’aurore, un jeune homme labourait péniblement sans avoir cessé un seul instant de s’astreindre à son rude labeur et Mathilde ne pouvait manquer de le voir.