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VENGEANCE FATALE

dans son âme. Devait-il craindre un ennemi dans le père d’Hortense ? D’un autre côté comment expliquer la possession de ce jonc par M. Darcy ? Le billet qu’il tenait de sa mère ne parlait que de Raoul de Lagusse. Aurait-il deux ennemis ? Toutes ces pensées bourdonnaient dans sa tête et l’empêchaient d’y voir clair.

Cependant dès qu’ils furent levés de table, il parut ressaisir sa gaieté habituelle.

On passa dans le salon.

— Hortense, demanda Louis à la jeune fille, savez-vous d’où Monsieur Darcy tient le jonc émaillé d’une fleur bleue qu’il porte continuellement à la main gauche ?

— Non, répondit Hortense. Mais que peut vous faire ce jonc ? Serait-ce pour m’en donner un semblable, ajouta-t-elle en souriant ?

— Peut-être.

— Dans ce cas, je vais le savoir de mon père, et Hortense traversa la chambre pour se rendre auprès de Darcy, qui fumait tranquillement un cigare de Havane, mais sans perdre un mot de la conversation des deux jeunes gens.

Cependant, il feignit n’avoir rien entendu et, lorsque Hortense lui parla du jonc qui préoccupait tellement Louis Hervart, il s’approcha de la lumière pour le bien faire voir par tout le monde. Ma fille, cet anneau, je le tiens de ta mère, dit-il. Je te le destine et je te le donnerai bientôt.

À ces paroles, Louis pâlit terriblement ; si véritablement ce bijou venait de la mère d’Hortense, celle-ci pouvait être sa sœur. Cette pensée le navrait.