Page:Dorion - Vengeance fatale, 1893.djvu/158

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
158
VENGEANCE FATALE

venu à l’idée que des amours fussent nées entre sa fille et l’ami de Louis Hervart. Toutefois il n’avait pu méconnaître les attentions nombreuses qu’Ernest lui avait marquées, ce qu’il avait appris principalement de la bouche même de ses filles. Il se demanda si ces attentions d’Ernest ne comporteraient pas quelque chose de plus qu’une simple affection et si, du moment qu’il conseillait à Louis d’enlever Hortense, il ne concevait pas en même temps la possession de Mathilde. C’eût été une entreprise hardie, mais non pas impossible, et l’on sait que l’audace ne manquait pas à Darcy.

— Ont-ils mentionné le nom de Mathilde, en complotant cet enlèvement, demanda-t-il à son homme de paille ?

— Devant moi, il n’a été question que de mademoiselle Hortense.

Ces mots rassurèrent Darcy.

— Tu crois décidément qu’ils iront à Lachine aujourd’hui ?

— Je n’en ai aucun doute, car pour n’y point aller, il leur faudrait changer d’idée complètement.

— Ce n’est pas tant cette conspiration qui m’agace que de voir Lesieur dans le camp de mes ennemis ; c’est un garçon audacieux, peu scrupuleux et véritablement homme d’action. Voilà un type que j’aurais rêvé pour mon gendre, malheureusement il est contre nous.

— Ne le regrettez pas trop, le mariage n’eût pu avoir lieu que dans le cas où mademoiselle Mathilde et lui se fussent aimés réciproquement.

— Qui te fait donc croire le contraire ?

Puivert regarda Darcy et ne répondit pas. Peut-être