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un derrière d’enfant. Le général s’arrêta émerveillé. L’autre, le nez baissé, faisait semblant de lire. Le général observa d’abord ce crâne avec intérêt, en connaisseur, comme un savant regarderait un obélisque ; puis, s’étant fait une opinion, il fronça les sourcils.

— Hep ! là-bas… le militaire

Lousteau leva brusquement la tête, feignant la surprise.

Puis il bondit et s’arrêta. à quatre pas, en faisant claquer les talons.

— Qu’est-ce que c’est que cette tête-là ? Vous êtes fou, mon garçon.

— Non, mon général, répliqua Lousteau la tête haute. C’est pour pas être puni.

Et, pas du tout intimidé, il se lança impudemment dans un récit remanié de ses démêlés avec l’adjudant, le coiffeur et le major, se faisant jouer le rôle infiniment sympathique du bon soldat persécuté.

Quand il eut terminé, le général tourna vers le capitaine Tarasse un visage fâché.

— Il est de chez vous cet homme-là, capitaine ? Je regrette, je regrette beaucoup… Ce n’est pas un homme, c’est un guignol. Arrangez-vous comme vous l’entendrez, mais si je reviens ces jours-ci, je veux que cet homme-là ait des cheveux comme tout le monde.

Lousteau en resta éberlué, se demandant comment on allait s’y prendre pour faire repousser ses cheveux en si peu de temps. Le capitaine trouva pour lui : il décida que le soldat Lousteau (Eugène) ne sortirait pas de prison tant