Page:Dorat - Œuvres diverses, Neuchatel, 1775.djvu/91

Cette page n’a pas encore été corrigée

Se rapelle des vers qu’il lui fait déclamer,
Et n’envie aux mortels que le plaisir d’aimer…

Mais quoi ! Quelle beauté s’avance sur la scene ?
Le sentiment conduit sa démarche incertaine.
Sa voix se développe en sons doux et flatteurs ;
Qu’elle sait bien trouver la route de nos cœurs !
Charmante Doligni, puis-je te méconnoître,
Toi, si chere à l’amour, que tu braves peut-être ?
Poursuis ; ce dieu léger, qui brigue tes faveurs,
Séduit par les attraits, est fixé par les mœurs.
L’art n’est point dégradé, lorsqu’il se multiplie.
On éleve par-tout des temples à Thalie.

Vous, qui nous amusez par d’utiles travaux,
Dans un monde brillant vous trouvez des rivaux.
Quel triomphe pour vous ! Sous ces lambris tranquilles
Où la grandeur s’échappe et s’enfuit loin des villes,
Dès que Flore a près d’elle assemblé les zéphirs,
Mille jeunes beautés, qu’unissent les plaisirs,
Au grand jour du théatre osant risquer leurs charmes,
Y savent exciter ou les ris ou les larmes.
La scene quelquefois rassemble deux amans
Gênés dans leurs desirs, et dans leurs sentimens.
Voyez comme leur joie éclate et se décele !
Voyez quel doux rayon dans leurs yeux étincele !
Malgré l’aimable dieu qui seul les fait agir,
Commandés par leur rôle, ils n’ont point à rougir.