Ils naissent du plaisir, je dois les respecter :
Viens, ta harpe à la main, m’apprendre à les chanter.
Léger comme tes pas, fidele à leur cadence,
Que mon rapide vers brille, parte et s’élance.
Déesse, la nature est soumise à tes loix,
Et ton silence actif le dispute à la voix.
Le voile ingénieux de tes allégories
Cache des vérités par ce voile embellies.
Rivale de Clio, tu sais conter aux yeux ;
Et tout, jusqu’à la fable, est vivant dans tes jeux.
Des pas tardifs ou prompts la liaison savante
M’offre de cent tableaux une scene mouvante.
J’y vois du désespoir le sombre accablement,
La colere d’un dieu, les transports d’un amant,
Mars courant aux combats, Daphné prenant la fuite,
Pour éviter l’amant qui vole à sa poursuite,
Les défis des pasteurs, les courses de Tempé,
Et celles de l’amour à Vénus échappé.
Mais de cet art charmant craignez la douce amorce.
Il rit à l’œil trompé qui n’en voit que l’écorce.
D’un trop crédule espoir n’allez pas vous bercer,
Et sondez le terrein qu’il faut ensemencer.
Avant de faire un pas, voyez si la nature
N’a point sur les calots calqué votre figure.
Héros, que votre taille ait de la majesté :
Berger, qu’elle nous plaise en sa légéreté.
Page:Dorat - Œuvres diverses, Neuchatel, 1775.djvu/113
Cette page n’a pas encore été corrigée