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Que les bons bourgeois, que la terreur du spectre noir rend stupides, y fassent attention, et qu’ils cessent aussi d’avoir une confiance impassible dans le dévouement et l’honneur de l’armée. « Voyez-vous, disent-ils, tant que nous aurons l’armée que nous avons, une armée soumise aux lois, une armée imbue des idées modernes et délivrée de la domination des Jésuites et autres rétrogrades, l’ordre sera assuré et, vous savez, l’ordre avant tout. »

Détrompez-vous.

L’ordre vient de l’ordre ; il ne se fait et ne se conserve que par l’ordre. L’armée n’est l’armée de l’ordre, n’est conservatrice de l’ordre, qu’à la condition d’obéir à un gouvernement d’ordre, qui fait de l’ordre ; mais quand au lieu de faire de l’ordre, un gouvernement fait du désordre, divise le pays et y allume la haine, l’armée qui lui obéit n’est plus l’armée de l’ordre ; elle devient, sans s’en douter d’abord, l’armée du désordre, et ses œuvres bientôt ne diffèrent pas de celles des apaches, dont on a déjà l’habitude de solliciter le concours dans les cas difficiles.

Il faut ajouter que l’armée irait vite, dans cette voie honteuse, et qu’elle deviendrait, promptement, un sujet d’effroi pour ses concitoyens ; car le fonctionnement de ses organes, quoique corrompus, et celui de sa hiérarchie, quoique pervertie, subsis-