Page:Donnet - Le Dauphiné, 1900.djvu/76

Cette page a été validée par deux contributeurs.
64
le dauphiné.

questeurs, ses triumvirs, ses flamines ; aux divinités indigètes succèdent celles du Panthéon romain. »

Et tout marche ainsi durant quatre siècles.

Pourquoi, en 379, Cularo s’appelle-t-il Gratianopolis, du nom de l’empereur Gratien ?

Pourquoi ? on ne sait point. Et M. Prudhomme, le savant archiviste, pas plus que les autres.

Passent les Barbares, les Burgondes. Et après les Burgondes, les Francs. Clotaire d’abord, Gontran ensuite et puis les maires du palais.

Ce fut sous l’administration de ces derniers que des Sarrasins réfugiés en Provence, à l’issue de la bataille de Tours, pénétrèrent dans les Alpes. L’évêque Isaac part en guerre contre eux et les chasse. Un grand homme, cet évêque ! On le voit fortifier le pays, s’installer en maître sur le Graisivaudan entier. Et l’histoire, lui mort, devient de plus en plus obscure. Histoire d’une ville qui lutte pour le respect de sa liberté, de ses privilèges. Émeutes pour le blé, pour l’impôt, conjuration de l’autorité civile contre le clergé…

En 1453, le dauphin Louis (depuis Louis XI) transforme le Conseil delphinal en Parlement, création importante qui assoit de manière définitive l’autorité française.

En xve et xvie siècles, années fatales : passages de soudards se rendant en Piémont, débordement du Drac, la peste… La détresse est immense. Le peuple meurt de faim. Charles VIII, Louis XII, François Ier assistent impuissants, indifférents peut-être… Et cependant, malgré cette indifférence, Grenoble reste toujours la généreuse. Elle n’a plus rien et donne quand même, sans compter, son sang, sa vie. Elle se bat pour la France, contre les Anglais, contre les Italiens.

Et ce n’est point encore assez de toutes ces épreuves. D’autres ennemis s’abattent sur elle : terrible époque d’inquisition.

Le 11 décembre 1517, le corps consulaire refuse de prêter main-forte au propagateur de la foi, envoyé dans les Alpes par le légat d’Avignon.

Le légat insiste, menace. Le refus est formel. C’est grave : c’est la guerre – d’autant plus inexorable, farouche dans ses représailles, que Luther est là aux portes, veut entrer, entre dans la personne du cordelier Pierre de Sebiville, figure étrange de prédicateur de la rue, beau, éloquent, attirant.

Chacun de ses sermons fait des prosélytes sans compter. L’évêque enrage. Il donne l’ordre d’emprisonner l’hérétique. Imprudente manœuvre. L’hérétique devient martyr : son prestige, son autorité s’accroissent de ses souffrances. Alors — et ce qui se passe ensuite appartient au grand livre des annales du fanatisme – alors des réunions ont lieu dans les faubourgs, on conspue le pape. La Réforme gagne. Au Parlement, déjà plusieurs sont convertis.

Que va-t-il arriver ?