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le dauphiné.

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n’y a pas de moyen plus sûr de les surprendre sur une chose que l’on a envie de faire que de leur dire sans affectation, trois mois auparavant, qu’on la fera ; car, comme ils ne nous auraient jamais parlé d’une chose qu’ils auraient eu en vue de faire, ils n’ont pas de plus forts arguments pour se persuader que vous ne la ferez pas, que celui de vous avoir ouï dire que vous la feriez. — Il y a assez peu de liaison d’amitié entre les habitants et, en revanche, il y a très peu d’inimitiés jusqu’à la rupture, de manière qu’ils demeurent toujours les uns à l’égard des autres dans un état susceptible de pouvoir se rechercher plus ou moins, à proportion que l’exige leur intérêt, auquel on ne croit pas qu’il y ait de pays où il y ait une plus vive attention. »

Vers la frontière italienne.

Encore un peu rosse, le portrait, mais ressemblant. Le montagnard est fait de cette sorte — et ne peut être autrement.

Méfiant, avare : il faut qu’il le soit, lui qui n’a que le chétif apport d’un travail difficile à garantir.

Son sol, par places, est tellement escarpé que les animaux de labour n’y peuvent servir ; de ses mains il creuse le sillon, souvent est obligé de porter la terre elle-même que les avalanches entrainent. Il attend quatorze mois ses blés mûrs et ne peut faire de semis qu’en provoquant le dégel.

Et, l’hiver, il est prisonnier dans ses neiges ; mais il s’évade, s’en va, infatigable colporteur, vendre de la graisse de marmotte contre les douleurs rhumatismales, des plantes rares, des minerais[1]… Et durant qu’il erre sur

  1. Il était aussi autrefois instituteur ambulant. Il allait dans le Lyonnais et de l’autre côté du Rhône. Une plume d’oie fixée à son chapeau annonçait qu’il savait lire et écrire à peu près correctement.