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le dauphiné.

Des aiguilles de 1,500 pieds se tiennent suspendues à l’atmosphère par des chaînons de glace, des bosses schisteuses s’évident en arcades, en dômes, architecture démesurée qui semble une folie de Dieu.

Les murailles de roches perpendiculaires sont cassées, rayées, décharnées ;
Entrée de la combe de Malaval.
on les dirait rongées par une eau-forte, hachées par mille lanières d’acier… Il n’est pas jusqu’aux nuages qui ne s’appesantissent au contact de ces masses et ne se figent, au-dessus d’elles, en de lourds blindages de métal.

La montagne, ici, est tout. Elle vous prend, vous couvre, vous annihile… — « Moi aussi, s’écrie Michelet, je me sentais méprisé et provoqué par ces énormités sauvages. Je leur dis assez brusquement : « Ne faites pas tant les fiers. Vous durez plus que nous. Mais qu’est-ce que vos hauteurs auprès des hauteurs de l’esprit ? »

Hélas ! les hauteurs de l’esprit ! — l’Éthique et le Contrat social – que c’est peu auprès de la Meidje ! Il n’est place pour rien d’humain à côté d’elle. Son triomphe crie par les trous béants de ses gorges.

Des gorges étroites, martelées de champs pierreux, au fond desquels les ravines dégringolent, effrayées de leur chute, presque muettes.

Des gorges étroites, aux teintes mordorées ainsi que taillées dans des planches de cuivre ; des roches rouillées ou noires, cirées à la mine de plomb ; des roches giflées d’ocre avec des traînées de neige salies dans leurs creux ; des roches fauves comme une peau de lion ; des roches brillantes, poudrées de mica, plus brillantes encore derrière le voile d’argent des cascatelles ; des roches en grisaille semblables aux écorces des très vieux arbres… La Romanche, à 250 mètres de profondeur, se tordant