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le dauphiné.

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exposée au soleil, où le blé mûrit à 1,700 mètres, et si haut s’accrochent les prairies que les paysans sont obligés de chausser des crampons de fer pour couper leurs foins.

Les maisons de la Bérarde.

Arrêt au Bourg d’Arud, à l’auberge du père Giraud, un bon vieux qui nous demande dix sous pour une omelette de dix œufs ! Ce prix nous parait tellement extraordinaire, fantastique, scandaleux, surhumain de bon marché — dix sous ! — que nous décidons, à l’unanimité, d’immortaliser ce trait unique de désintéressement. Et c’est pourquoi je chante sur ma cithare le père Giraud et son omelette !…

On monte sans cesse dans les escarpements cassés en jets brusques et tout à coup, comme en un trou, on dévale… Un entonnoir, un maelstrom de pierres, d’éboulis prodigieux, décloués de la cime du Soreiller. La montagne pèle — et ce sont les lambeaux de sa peau, énormes, tordus, jaunâtres, tuméfiés, recouverts de mousses cancéreuses, qui émergent de ce chaos… Tout est foudroyé, désolé, arraché, détruit.

Ces assises étaient autrefois cultivées. Un jour vint, date inconnue, où les hauteurs surplombantes furent ébranlées. Les premiers gradins disparurent sous les ruines. Le torrent arrêté dans son cours reflua, « changeant en lac le plateau situé au-dessus de l’éboulement : — le Plan-du-Lac ».

Le Vénéon s’apaise, s’étend comme une blanche étoffe de soie ; les éboulis disparaissent, les roches sont presque lisses. La brèche s’écartèle