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le dauphiné.

et une grosse horloge ronde sur sa face, comme l’œil d’un cyclope, et des portes mutilées, dont il ne reste que moignons de pierre… Des rues désertes, des maisons noires à façades dentelées, aux toits ventrus, fourrés de mousses…

Toute une ville s’est endormie là, d’un sommeil pesant, rigide, cataleptique. Cette ville fut Crémieu. Nulle part ne s’affirme

Crémieu.
plus forte, plus nette, l’empreinte féodale.

Une page de grande histoire, que son histoire.

Crémieu, centre de mandement des barons de la Tour-du-Pin. Crémieu qui doit sa prospérité à une charte de franchises que lui signa le dauphin Jean II.

Louis XI, en 1466, la cède en dot à Jeanne, sa fille naturelle, lorsque cette dernière épouse le bâtard de Bourbon. Tranquillité relative. Mais un siècle plus tard, vont s’allumer les guerres religieuses. Les compagnons des Adrets exercent consciencieusement leur pittoresque métier de bandits autorisés. Ils pillent, volent, rançonnent les bourgeois. L’un d’eux, naïf en deçà de raison, se plaint au terrible chef de ce que « tout le vin de son cellier a été tiré et qu’il ne reste pas une botte de foin dans sa grange ».

Heureux bourgeois ! si jamais les soldats catholiques ou huguenots ne se sont rendus coupables envers lui de plus graves méfaits !

Au signal de la Saint-Barthélemy, les luttes ne font, cela va de soi, que s’accroître.

Lesdiguières et Montbrun entrent en scène. Alertes sur alertes — sans jamais, à vrai dire, de sièges réglés, quoiqu’en 1574 et en 1576 on se vit obligé de remplacer la milice par des troupes régulières.

Mais ce n’étaient là qu’escarmouches, menaces de combats, plutôt