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le dauphiné.

Ce sont de gigantesques tranchées, ouvertes à coups de mine. Le roc nu, cassé, émietté, comme en un lendemain de tremblement de terre.

À chaque détour, des apparitions de montagnes grandissent. Puis les parois se rejoignent encore, la locomotive semble glisser dans un chenal. Des gorges s’ouvrent, jonchées de mélèzes… Saint-Maurice-en-Trièves et Lalley, berceau de la famille Mounier…

Et le mont Aiguille, sa silhouette énorme, inoubliable, taillée en obélisque. Le Mons inaccessus que chantait Geoffroy de Tilsbury, en 1200.

Luz. — La Croix-Haute.

C’était la demeure des dieux et des déesses. Chassés de l’Olympe, tous se réfugièrent là, dans des grottes de cristal. Mais il arriva qu’un jour le chasseur Ibicus les surprit. Courroux de Jupiter, qui lance ses foudres contre la cime profanée. L’incendie dévore les forêts, et des lambeaux de rocs s’écroulèrent, séparant la hauteur sacrée des chaines voisines. L’imprudent Ibicus, victime de sa curiosité, fut changé en bouquetin et « condamné à errer jusqu’aux derniers siècles sur ces pentes fatales. La nuit, on l’entend bramer dans les cimes, quand hurlent les vents d’orage ».

Et le mont Aiguille était aussi la demeure des nymphes, ajoute Mme Louise Drevet. Chaque soir elles venaient laver leurs tuniques légères et, le matin venu, les étendaient sur l’herbe pour les faire sécher. Un pâtre, aussi curieux qu’Ibicus, parvint à les atteindre. Mal en prit au pauvre