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le dauphiné.

— Vous savez, m’a-t-il dit, que c’est la vogue à Vif, tantôt — et une riche vogue, allez, je vous en réponds ! Nous aurons le Pointu !

— Le Pointu !… Qu’est-ce que le Pointu, père Cottavoz ?

Le vieil Allobroge eut un haut-le-corps :

— Vous ne connaissez pas le Pointu ?

— Parole d’honneur !

— Eh ben, en voilà une sévère, par exemple ! Le Pointu, notre ménétrier !…

Brusquement, le rideau qui obscurcissait ma mémoire se déchira.



Dans les éboulis du Grand-Veymont.
— Arrêtez, arrêtez, père Cottavoz, je me souviens maintenant !

Et je la revis très nette, la grande figure du Pointu.

Certes, oui, le plus fameux ménétrier des trois cantons ! À Varces, à Risset, à Fontagnieux, à Seyssins, partout son archet vainqueur ! Mais il prenait de l’âge, notre Pointu, déjà le bras pincé par un rhumatisme et, dame, aujourd’hui, pour l’avoir, il fallait longuement insister et les cachets se payaient double. On m’a parlé de cent sous, non compris le cigare et les petits verres !

C’était une vraie chance pour moi de pouvoir réentendre le roi des ménestrels.

Père Cottavoz, nous partons !

Nous partons dans un tape-cul archaïque, muni d’une semelle de soulier en guise de frein.