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Et maintenant que ce petit récit de banditisme et d’héroïsme à panache est achevé, peut-être en est-il qui concevront des doutes sur la réalité de ce saut de 30 mètres dans un torrent fougueux. Ils en ont le droit. Le scepticisme, passant aujourd’hui pour un dogme, appartient à tout le monde. Pourtant, je leur conseille de ne pas faire étalage de ce scepticisme quand ils iront en Dauphiné.

Là-bas, nous sommes tous mandrinistes ; Mandrin reste notre héros.

Près de Vizille. — Champagnier.

Oui, je le sais, nous avons Bayard — et je suis embarrassé, je rougis presque d’accoler Bayard à Mandrin — mais Bayard est une perfection. On le met dans une niche, au-dessus d’un nuage, on l’adore… Il fut sans peur, sans reproches ; il fut bon, généreux, humain, surhumain ; il représente toute la belle monotonie du devoir accompli, ce chevalier !… tandis que Mandrin ! — J’avoue mon faible pour Mandrin, chapardeur de haute allure à qui il n’a manqué que deux quartiers de noblesse pour être une de ces figures respectées, dont l’éloge prend place dans les Manuels du parfait citoyen.

De quoi se compose une réputation ?

À la tête d’un régiment, allant, par ordre du roi, assiéger et piller les villes, tuer les femmes et les enfants, Mandrin était un grand capitaine. Mais Mandrin, organisateur de la résistance aux persécutions fiscales, à