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Et quand revient Octobre et que dans la pâleur
D’un ciel à peine bleu, le soleil sans chaleur
Semble veiller sur la nature jaunissante
Comme un flambeau mourant sur une agonisante,
Alors, dans ce suprême et mystique décor,
Les grands parcs, les vieux parcs, sont plus tristes encor.
C’est là que nous irons, ma Jeanne, cet automne.
Sous les feuillages roux il n’y aura personne.
Seuls les oiseaux frileux, déjà sur leur départ,
Diront en nous voyant : « Comme ils arrivent tard ! »
Vous suivrez à mon bras les désertes allées ;
Les feuilles tomberont des branches désolées
Et, parfois, en passant près de quelque massif
Vos yeux, vos tendres yeux sous votre front pensif,
Verront tomber, tomber, les feuilles une à une
À vos chers petits pieds, ô ma maîtresse brune,
Et par le moindre vent les cueillant sans effort,
Tourner, tourner ainsi que des valseuses d’or.


Pourtant, dans votre cœur avide de caresses,
À longs flots ascendra la sève des tendresses ;
Pourtant, vous sentirez dans votre être exalté
Des fraîcheurs de printemps et des langueurs d’été.
Vos seins palpiteront en des rythmes de vagues,
Et s’ouvriront vos bras pour des étreintes vagues ;
Car nous aurons beau voir les gazons se flétrir,
Les bois jaunir, les oiseaux fuir, les fleurs mourir,