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Et voilà qu’un air bien connu se fait entendre :

(Un violon solo, plaintif et lamentable, joue l’air : « Je suis l’oseille. »)

Et à l’appel de son nom, une femme également bien connue apparaît.

(En effet, comme la Fée du champ, sort de terre une femme court vêtue avec, sur la tête, un extravagant chapeau, en un mot habillée comme les chanteuses de café-concert dénommées grandes gommeuses. Elle dit :)


Je suis l’Oseille, femme éternellement verte ;
Je n’ai jamais trouvé d’autre carrière ouverte
Sinon d’être l’Oseille, et de tout temps, depuis
Que ce pénible monde est monde, je la suis.
Or c’est mon strugle for life, être ou ne pas être…
Quoi ? L’Oseille. Aussitôt qu’on me voit apparaître,
Au parterre, au balcon, partout, du haut en bas,
Avec le sourd frisson précédant les combats,
On dit : Voilà l’Oseille ! Et quand on me conseille
De chanter moins faux, je souris : Je suis l’Oseille !
Que voulez-vous qu’on trouve à répondre à cela ?
La vie est courte… je suis l’Oseille… voilà !
Entre les maillots noirs, blancs, gris, mauve, groseille,
Mon maillot vert paraît toujours : je suis l’Oseille,
Et, sans me désirer, le spectateur m’attend,
Ou plutôt s’attend à moi. Toujours en chantant,
J’ai l’air fatalement idiot ; … je zézaye,