Page:Doin - Le conscrit ou le Retour de Crimée, 1878.djvu/32

Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 32 —

C’t’avenlure-là a décidé mon cousin Bertambois à faire assurer ses canards contre l’incendie.

Robert et Julien (aux éclats).

Ah ! ah ! farceur de Criquet, va !

Julien (en riant).

Et ta prétendue, ta grosse Rose, Criquet ?

Criquet (soupirant).

Ah ! Julien, tu viens d’rouvrir une grande blessure dans mon cœur !

Julien (souriant).

Comment ? Est-ce qu’elle t’aurait fait des traits ?

Criquet.

Horriblement des traits !

Robert.

Diable ! Voyons, compte-nous donc ça, mon pauvre Criquet.

Criquet.

Pour lors, donc, maginez-vous, qu’il était v’nu dans l’village, un grand méd’cin qu’les autres appelaient comme ça un charpatran…

Robert (riant).

Un charlatan, tu veux dire ?

Criquet.

J’sais pas… p’t’être ben comme ça… enfin, il était dans l’village et tous les jours y v’nait sus la grand’place vendre toutes sortes de drogues, des onguents et pis des vulnéraires pour les brûlures, les cassures, les chicots gâtes, les engelures, les cors aux pieds et pis pour faire pousser les cheveux sus les têtes chauves… bast !…est-ce que j’sais moi, toutes sortes de choses, quoi !… Il était galonné sus toutes les coutures, avec un grand chapeau à plumes rouges à trois cornes, avec des bottes d’or et une grande cocarde rouge ; il était perché sus une grande belle voiture avec deux grands ch’vaux, peinturée en rouge, en jaune et pis…