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maison que j’ai fait bâtir pour ta vieille mère… tu sais… hein ?… que tu me dois une petite somme… comme… heu… heu… huit cents francs.

Julien (surpris et attristé).

C’est vrai, M. Lefuté… mais vous savez aussi que la récolte de l’année dernière n’a pas été très-bonne, que ma pauvre bonne mère a été malade une partie de l’hiver… Mais cette année le travail va bien, je gagne de bons gages et je pourrai avant peu vous donner un bon à-compte.

Lefuté (toujours flattant).

Ah ! mon garçon, je ne suis pas inquiet de toi… je te connais et tu es aussi connu de tous, pour ton travail, ta bonne conduite et surtout pour le filial dévouement que tu portes à ta mère… mais… vois-tu… si j’avais cette somme… ça m’aiderait pour retirer Criquet… Tu… comprends ?

Robert.

Allons, allons, père Lefuté, laissez donc ce pauvre Julien tranquille… que diable lui chantez-vous là ? car, je vous vois venir.

Lefuté.

Ah ! Robert, tu me juges mal, je n’ai que de bonnes intentions.

Robert (souriant).

Oui, oui, mais vous êtes un fin renard, et je crois vous comprendre… on ne vous appelle pas Lefuté pour rien…

Lefuté.
(Il amène Julien sur le devant de la scène. Robert et Criquet restent au fond ; Robert prête l’oreille de temps en temps à la conversation, les autres conscrits se remettent à table et ne se lèvent que lorsque le sergent arrive avec Tapin.)

Écoute, mon Julien, je vais te parler ouvertement, c’est aussi dans ton intérêt comme pour le mien. Consens à partir à la place de Criquet et…