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qu’il est noir, mais en fait de talents, la couleur n’y fait rien, et je vous livre celui-là pour le premier ours du monde. Il a fait l’admiration de toutes les cours et ménageries de l’Europe. En ce moment il arrive directement de Paris, où il avait été appelé par souscription. Cet ours dans le séjour qu’il a fait à Paris, a pris les belles manières et les gentillesses des citoyens de cette grande ville. Il boit, il mange, pense et raisonne comme vous et moi pourrions faire.

Marécot.

C’est admirable.

Lagingeole.

Il joue, il danse comme un personne naturelle. Je n’ai pas encore pu lui apprendre à chanter ; ça viendra ; mais en revanche, il pince de la harpe, de la guitare divinement et il a manqué de figurer dans une représentation à bénéfice pour le doyen… des ours.

Marécot (enthousiasmé).

Ah ! mon ami, mon cher ami, nous sommes sauvés : je prédis à vous et à votre ours le sort le plus brillant ! Par exemple, si celui-là ne devient pas le favori du pacha !… Mais ce n’est pas tout : le pacha aime aussi les poissons ; il nous faudrait donc un poisson extraordinaire.

Tristapatte.

Je vous comprends bien ; vous ne voudriez pas un roquet de poisson, un goujon, par exemple.

Lagingeole.

J’y suis, monsieur voudrait un beau poisson, un poisson comme on n’en voit pas beaucoup.

Marécot

Un poisson comme on n’en voit guère.

Lagingeole (froidement).

J’ai votre affaire. Prenez mon ours.

Marécot.

Je pourrai fort bien m’arranger de votre ours, mais…