Page:Doff - Jours de famine et de détresse, 1943.djvu/75

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

orange, dont l’ordre et la propreté m’intimidaient. Au milieu du plancher, passé à l’eau de craie, était étendue une grande toile à voile peinte en jaune avec bord orange, que la femme repeignait tous les ans ; tout autour des nattes ; devant et sous la table, placée entre les deux fenêtres et couverte d’une toile cirée jaune, des morceaux de tapis de toute couleur. Aux fenêtres à guillotine, des pots de géraniums qui, l’été, étaient à l’extérieur, des rideaux en mousseline à carreaux maintenus par des rubans jaunes, et au milieu un écran en étamine bleue, pour que « les voisins ne pussent vous compter les morceaux dans la bouche ». Hors des fenêtres, des séchoirs où, par les temps secs, pendaient les chemises en laine rouge du mari.

Des chaises peintes en acajou étaient rangées le long des murs ornés d’images. Dans un angle, se trouvait une commode en acajou, garnie de grands cuivres aux serrures et surmontée d’une barque à voile, œuvre du mari, ancien marin. Sur la table, un bocal, avec un poisson doré et, près de la place du mari, un crachoir en faïence bleue ; sous la table, deux chaufferettes en bois.

Un doux engourdissement m’envahissait. Ce confort, si loin de notre vie, me faisait rêver. Ce bon fauteuil en paille, si père l’avait le soir pour