Page:Doff - Jours de famine et de détresse, 1943.djvu/67

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

coiffures de mes poupées, et le fameux chapeau, sujet de mes transes, je l’avais fait moi-même.

Je m’en fus donc seule, un soir, par une pluie battante. J’entrai avec mon invitation. En ôtant mon chapeau, je le dissimulai, comme une voleuse, sous mon tablier. J’ai le souvenir d’une joie de commande. On nous donna du lait d’anis et des petits pains beurrés ; on nous fit chanter de nombreux Wien Neerlandsch Bloed et des Wilhelmus Van Nassauwen, et dans la cour qu’éclairaient quelques lampions, nous dûmes, par une pluie chaude qui nous faisait fumer comme dans un bain turc, jouer des Patertje, Patertje, langs den kant et des Collin-Maillard. Enfin la tombola !

— Y a-t-il des boîtes à coudre ?

On regardait par les carreaux.

— Oui, là, plusieurs même.

— Ah ! je les vois ; si je pouvais en gagner une !

Et je me tins ce langage : « J’ai douze ans ; il est temps que j’aie une boîte à coudre à moi, pour ne plus recevoir de torgnioles quand j’ai gâché le fil de ma mère. Puis, dans une boîte, il y a tout : un dé, des ciseaux et autres outils. » Ah ! mon tour. Je prends un billet : un Monsieur l’ouvre et dit :