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voyant mes dessous en guenilles, n’osait pas me laisser monter, que n’aurais-je donné cependant pour grimper là-haut !

Et ainsi pour tout !

La première communion approchait. Le curé de notre nouvelle paroisse venait d’être nommé : il était plein de zèle et de délicate bonté, et s’occupait beaucoup de donner un grand éclat à cette cérémonie.

Au lieu de distribuer aux pauvres des uniformes qui les désignaient, il s’arrangea avec les dames patronnesses pour remettre aux mères l’argent des toilettes.

Depuis longtemps, ma mère et moi, nous parlions de cette robe qui allait me stigmatiser ; mais elle reçut dix florins, et nous pûmes acheter tout à notre goût. J’eus un chapeau blanc entouré de gaze, une robe grise à ruches effilées, raide comme une planche, qui m’encaissait au lieu de m’habiller, de hautes bottines à lacets de soie blanche avec deux petites floches sur le pied, et des gants de coton blanc.

Une dame me donna du linge de sa fille, si bien lavé et repassé que c’était plus beau que du neuf.

Mes cheveux bouclaient naturellement, mais l’avant-veille de la première communion, on me