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La première fois que je m’y rendis, je portais une petite robe en indienne lilas, un tablier blanc propre, et un ruban bleu dans les cheveux. Une sœur novice me conduisit jusqu’à la classe que je devais suivre, et dit à la sœur qui la dirigeait : « C’est la fillette de Madame… » en nommant la dame qui avait versé les cinq florins. Je fus saisie et regardai rapidement les petites filles pour voir si elles avaient entendu. Il y en avait une qui, tout de suite, me dévisagea avec dédain. Les autres me reçurent très bien. Celle qui se trouvait derrière moi me demanda mon nom. Je lui répondis :

— Keetje Oldema.

Elle se mit à me caresser les cheveux et le cou : cela me parcourait des pieds à la tête exquisement, et puis la nouveauté de la chose me charmait. Ici, on n’allait donc pas me traiter en paria. Je devais bientôt déchanter. La petite qui me caressait, avait dû apercevoir mes croûtes et mes poux, sous mes beaux cheveux blonds ondulés. Je l’entendis chuchoter avec sa voisine et dire : « Pouah ! » Celle qui avait surpris le nom de la dame l’avait répété aux autres et, à la sortie de l’école, on me traitait déjà avec mépris. Au bout de quinze jours, j’étais, comme partout, la bête noire de tous. Si je m’approchais,