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NON ! NON !


Les jours où la misère ne nous talonnait pas trop, j’avais des joies et des sensations exquises, par le seul effet de mon imagination. Je prenais, ces jours-là, ma poupée, mes osselets, mon sac rempli de morceaux de porcelaine et de faïence, adornés d’une fleurette ou d’une arabesque, et j’allais sur les grands canaux, à la recherche d’une belle maison.

Les grands canaux d’Amsterdam m’inspiraient beaucoup de respect : je ne pouvais me rêver Cendrillon que dans une de ces maisons du XVIIe ou du XVIIIe siècle, à haut escalier double de granit bleu, clôturé de grilles et de chaînes de fer forgé, à la majestueuse porte sculptée, vert foncé comme l’eau bourbeuse des ca-