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MA FILLE, MONSIEUR CABANEL

(Félicien Rops).


Mina s’était prostituée par paresse et veulerie. Elle était chue dans une maison discrète, à l’air respectable et effacé, où, le soir, se glissaient des messieurs du meilleur monde. Les femmes n’y allaient qu’à la nuit. Elles appelaient la tenancière : « Mère », et devaient, après avoir reçu un client, remettre leurs chapeaux et leurs gants, comme si elles ne venaient que d’arriver.

Quand ma sœur eut fait le tour des habitués, qui ne reprenaient jamais la même femme, elle ne gagnait plus rien. Tous ses beaux vêtements étaient au mont-de-piété, et ce fut, chez nous, la famine comme avant, car mon père, usé par les privations et par l’alcool, ne travaillait plus.