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LES DEUX GRENADIERS


Ma mère avait déjà brûlé nos joujoux, pour atténuer un peu le froid humide qu’il faisait chez nous. Comme elle n’était accouchée que de dix jours, elle avait peur, disait-elle, d’attraper un frisson.

Nous attendions mon père, qui était cocher chez un loueur : peut-être aurait-il reçu un pourboire, et pourrions-nous acheter des tourbes et du café pour nous réchauffer. De manger, mon Dieu ! on se passerait : il fallait d’abord s’ôter cette rigidité des membres.

Mon père rentra, courbé en deux, les mains dans les poches, tremblant sous son bourgeron de coton.