Page:Doff - Jours de famine et de détresse, 1943.djvu/117

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

besoin pressant, et impossible de me soulager, à cause des garçons.

Nous arrivâmes à la Westerkerke, autour de laquelle nous jouâmes à cache-cache, en nous couvrant de neige. J’aurais voulu me retirer sous une charrette ou dans un recoin, mais les autres couraient après moi.

J’étais au supplice : je devins tranquille et ne pouvais plus jouer ; je dis à mes camarades que le froid me figeait.

Au retour, devant cette même église, l’accident m’arriva. Cela me coula chaud jusque dans les sabots, et à l’instant même, des hanches à la pointe des pieds, mes vêtements se gelèrent sur mon corps : je fus brûlée et lacérée jusqu’au sang. Je me mis à pleurer ; la neige tombait drue ; elle me collait à mes sabots en une masse compacte et pointue, qui me faisait clopiner péniblement. En arrivant chez nous, j’eus à peine le temps d’ouvrir la porte, et je tombai.

Mon père me déshabilla, essuya doucement le sang, en répétant :

— Ma pauvre petite « Poeske », elle est toute crevassée, ma pauvre petite « Poeske » !

Il m’assit sur une chaise devant le poêle, et me donna une tasse de café aux trois quarts remplie de marc ; mais je ne voulais rien dire,