Page:Dodge Stahl - Les Patins d argent.djvu/63

Cette page a été validée par deux contributeurs.

troublés vers une étrange figure accroupie devant le foyer.

« Cependant, si mon argent pouvait amener un docteur d’Amsterdam pour voir le père, on pourrait peut-être faire quelque chose.

— Un docteur ne voudrait pas venir, Hans, pour deux fois autant d’argent, et d’ailleurs cela ne servirait de rien. Ah ! combien d’écus n’ai-je pas dépensés pour cela, autrefois ! Rien n’y a fait ! L’esprit du cher bon père n’a pas voulu s’éveiller. C’est la volonté de Dieu. Va, Hans, achète-toi des patins. »

Hans partit, le cœur triste. Mais ce jeune cœur battait dans la poitrine d’un vaillant garçon. En moins de cinq minutes il se mit à siffler. Sa mère l’avait tutoyé, elle lui avait dit : « tu » et c’était bien assez pour faire d’un jour triste un jour ensoleillé. Les Hollandais ne s’adressent pas la parole d’une manière aussi intime que les Français et les Allemands ; mais dame Brinker avait, dans sa jeunesse, brodé pour une famille française et elle en avait rapporté dans sa chaumière rustique les « tu » et les « toi » pour s’en servir dans les grands moments, dans les moments où son cœur ému avait besoin d’expansion.

Par conséquent, ce « qu’est-ce qui te retient, Hans, » chantait comme un écho sous le joyeux sifflet du jeune homme, et lui faisait regarder sa mission à Amsterdam comme une mission bénie.

Broek avec ses rues tranquilles et sans taches, ses ruisseaux gelés, son pavé de briques jaunes et ses maisons de bois verni, était tout proche. C’était un village où la propreté et l’apparat étaient en pleine floraison, mais dont les habitants étaient si endormis qu’on eût pu les croire morts.

Aucune empreinte de pas ne déparait jamais les sentiers sablés où des cailloux et des coquilles de mer formaient