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bution mobilière c’est-à-dire de moins de 6 millions en totalité. Et l’on songerait à surcharger de 70 millions, c’est-à-dire à rendre douze fois plus lourd qu’il n’est aujourd’hui, un impôt dont l’histoire renferme de tels enseignements !

Cela n’est pas un instant discutable.

Deux personnes ont avancé, dans l’enquête ouverte à Paris, que le produit de l’octroi pouvait être remplacé par une adjonction simultanée aux impôts foncier, personnel et mobilier et des patentes.

Le principal de ces trois impôts directs, pour Paris, figure aux rôles du dernier exercice pour 22,032,050 fr. Le surcharger de 70 millions, ce serait ajouter 310 centimes par franc aux 54 centimes additionnels de toute nature dont il est déjà grevé. Chaque cotisation foncière, personnelle et mobilière et de patente se trouverait donc triplée. Mais, selon l’expression de Franklin, les marchands feraient passer leur imposition dans leurs factures[1], les propriétaires en grossiraient les loyers, tandis que les petits locataires, n’ayant plus le secours de l’octroi pour payer, en tout ou en partie, leur cote personnelle et mobilière, en subiraient, sans allégement, l’énorme fardeau.

La contribution directe frappe le contribuable d’une charge condensée, qu’il ne peut fractionner que par douzièmes, fixe sa cotisation sans lui, malgré lui, d’après des bases générales qui ne peuvent s’accommoder à toutes les fortunes, à toutes les combinaisons du revenu privé, l’appelle tous les mois chez le percepteur, le gourmande s’il tarde, le presse souvent hors de sa convenance, le poursuit et, au besoin, l’exproprie.

L’octroi, au contraire, subdivise la perception en parcelles insensibles, n’affecte d’une manière immédiatement appréciable aucune partie du revenu individuel, échappe à l’attention du consommateur, qui se taxe lui-même, sans le savoir, selon ses moyens, ses salaires, sa volonté, ne met jamais les contribuables en face du collecteur, et procure cependant aux communes les recettes nécessaires pour doter convenablement les services municipaux.

Le rehaussement des contributions directes, qui remplacerait l’octroi, serait intolérable à la population, surtout à la masse des habitants peu aisés de Paris et de la banlieue réunis. Bientôt, la clameur publique amènerait la réduction de

  1. Discours de Franklin au Parlement d’Angleterre, cité dans un rapport de M. d’Allarde, au nom du comité des contributions publiques à l’Assemblée-Constituante ; séance du 15 février 1791.

    (Voir les Œuvres de Turgot, I, 49.)