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18.
9 FÉVRIER 1880.

Le Gouvernement espagnol a pensé qu’il ne devait pas, en ce moment, écouter des propositions qui pourraient lui créer quelques embarras et il a refusé de laisser venir à Madrid ces chefs marocains qui sont restés à Malaga ; mais ceux-ci paraissent vouloir obtenir une réponse définitive et auraient dit que si l’Espagne ne voulait pas accueillir leurs propositions ils savaient à qui s’adresser pour être mieux reçus.

C’est sans doute par suite de cette allusion que M. Canovas a tenu à savoir si l’attention du Gouvernement français avait été éveillée par la démarche des chefs de tentes des environs de Melilla et si j’avais reçu quelques instructions à cet égard. N’en ayant reçu aucune, j’ai dû me tenir dans des généralités en me basant sur ce que M. Waddington m’avait dit verbalement, à savoir que la France ne verrait pas d’un œil jaloux les progrès que l’Espagne pourrait faire un jour dans le Maroc. Au fond, et malgré certaines réticences sous lesquelles il était assez difficile de deviner sa pensée exacte, j’ai compris que M. Canovas del Castillo aurait voulu savoir si, au cas où les chefs marocains se tourneraient vers nous, nous serions disposés à annexer leurs territoires et à porter notre frontière jusqu’aux abords de Melilla.

En terminant, et après m’avoir dit d’abord que certainement l’Espagne préférerait nous avoir pour proches voisins plutôt que des Kabyles barbares et pillards, le Président du Conseil a fini par ajouter que le statu quo était ce qui lui paraissait préférable et qu’il allait négocier avec le Maroc pour que les chefs qui se trouvent à Malaga puissent retourner chez eux sans y être inquiétés, ce qui était dire que l’Espagne allait les couvrir d’une sorte de protectorat.

Tels sont les détails d’une conversation qui m’a paru devoir intéresser Votre Excellence.

P. S. — Je crois utile de joindre à ce qui précède la copie d’une lettre écrite ces jours-ci de Melilla et publiée par un journal ministériel.

20.

M. de Freycinet, Ministre des Affaires étrangères à l’Amiral Pothau, Ambassadeur de France à Londres.

T.
9 février 1880, 7 h. 45, soir.

Si vous ne pouvez absolument voir Lord Salisbury, tâchez de voir Lord Beaconsfield et d’obtenir la véritable pensée du Cabinet anglais sur l’affaire grecque. Nous voyons les plus grands inconvénients à la prolongation du statu quo.