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10.
29 JANVIER 1880.

9.

M. de Freycinet, Ministre des Affaires étrangères à M. de Bâcourt, gérant du Consulat général de France à Bucarest.

T.
Paris, le 29 janvier 1880, 8 h. s.

Nous serons heureux de nous mettre d’accord le plus tôt possible avec le Cabinet de Bucarest pour la reconnaissance officielle de l’indépendance de la Roumanie. Mais il est au moins un point sur lesquel il nous parait nécessaire d’obtenir un éclaircissement préalable. Le paragraphe 5 du nouvel article 7 de la constitution roumaine déclare que les Roumains seuls et les naturalisés roumains pourront acquérir des immeubles ruraux ; toutefois les droits acquis seront respectés. Comme nos nationaux étaient jusqu’à ce jour en possession du droit d’acquérir des immeubles ruraux en Roumanie, nous comptons que la loi nouvelle ne portera aucune atteinte à l’état de choses dont ils doivent conserver le bénéfice, et qu’ils pourront dès lors continuer à acquérir des immeubles comme par le passé. Mais il serait bon que cette interprétation fût fixée soit par une déclaration officielle faite au Gouvernement français, soit au moins par une décision de principe émanant de la Cour de cassation et réglant la jurisprudence. D’après des renseignements particuliers, j’ai lieu de penser que les Ministres roumains se prêteraient volontiers à cette dernière combinaison[1].

  1. M. de Freycinet revient sur la question dans un télégramme du 6 février, 3 h. 45 soir qui débute ainsi : « Nous ne saurions admettre en principe aujourd’hui, pas plus que nous ne l’avons fait par le passé, que les Français israélites fussent traités en Roumanie, au point de vue du droit d’acquérir, autrement que nos nationaux appartenant à une des confessions chrétiennes, » M. de Freycinet renouvela encore ses instances le15 février au moment où la France allait reconnaître officiellement le nouveau royaume. Le 8 avril (télégr. de Bucarest, 14 heures soir), M. Bratiano refusait de faire la déclaration officielle qu’on lui demandait ; il affirmait seulement que, « dans la pratique, aucune difficulté ne serait apportée à l’exercice du droit d’acquérir des biens ruraux, sauf pour les Juifs ».