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6.
12 JANVIER 1880.

avec votre prédécesseur, en cherchant à bien définir la situation ici, et à réduire à leur juste valeur les insinuations évidemment malveillantes et certainement intéressées, au moyen desquelles on s’efforce habilement et dans un but facile à apercevoir de fausser cette situation aux yeux de l’Europe. En Russie, on désire la paix, et on sent qu’on en a besoin. Ni le souverain, ni la nation ne semblent vouloir la guerre ; et, en dehors d’une réorganisation toute naturelle des forces militaires, des précautions obligées sur la frontière de l’ouest, la plus menacée, aucune mesure pouvant impliquer des projets belliqueux n’a été prise dans ces derniers temps. Les renseignements demandés par M. Waddington à notre Consul général de Varsovie confirment pleinement à ce sujet ceux que j’avais fournis moi-même. Je considère donc comme dénués de fondement les articles alarmants qui paraissent en ce moment dans quelques journaux de Berlin, de Vienne et de Londres, articles qui semblent émaner de la même inspiration, et qui préparent évidemment quelque machination politique qu’il est bon de surveiller. La Gazette de Cologne, dans son numéro du 4 de ce mois, a été tout particulièrement violente à l’endroit de la Russie qu’elle accuse d’être seule a vouloir troubler la paix. Ce même article contient un avertissement qui paraît, aux yeux de tous, adressé à la France ; aussi a-t-il produit ici une grande émotion. On souffre donc beaucoup de la persistance de ces accusations ; la nation, parce qu’elle sent d’où elles partent, et que ses antipathies pour l’Allemagne augmentent à chaque froissement ; l’Empereur, parce que, malgré son désir évident d’entente, et ses avances pour maintenir les relations d’autrefois avec la Cour de Berlin, une influence contraire paralyse tous les efforts.

Les gens sérieux, qui cherchent à voir les choses telles qu’elles sont, vont jusqu’à accuser l’inspirateur de la politique allemande d’aider sciemment aux menées du parti révolutionnaire en Russie, en mettant l’Empereur en contradiction avec les véritables sentiments de la nation.

[On voudrait savoir à Saint-Pétersbourg si M. de Saint-Vallier restera à Berlin. Bruits prématurés d’entente entre l’Angleterre et la Russie sur les affaires d’Asie. Inquiétudes générales mais vagues.]

6.

M. de Ring, Agent diplomatique et Consul général de France au Caire, à M. de Freycinet, Ministre des Affaires étrangères.

T.
Le Caire, 12 janvier 1880. 6 h. 10. s.
(Reçu : le 13, à minuit.)

L’état des navires ayant transité le Canal de Suez pendant le mois de décembre dernier accuse deux avisos de guerre italiens, l’Esploratore et l’Ischia, entrés