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1er JUILLET 1880.

celui de tous les Musulmans. J’ai très vivement combattu cette théorie de suicide politique, mais sans pouvoir faire avouer au Ministre des Affaires étrangères du Sultan que, si le démembrement de l’Empire ottoman était inévitable dans un cas, son salut était non seulement possible, mais probable dans l’autre ; Abeddin Pacha m’a conjuré à la fin de l’entretien d’appuyer auprès de Votre Excellence la suggestion dont il m’avait déjà fait part dans notre précédent entretien.

Le seul moyen, à ses yeux, d’empêcher un conflit sanglant entre l’Albanie et la Grèce, d’éviter à la Grèce d’immenses sacrifices, d’épargner enfin à l’Europe des complications, dont nul ne peut prévoir la portée, était que la France prît l’initiative d’une transaction analogue à celle qui s’était produite par deux fois dans la question du Monténégro, et fît prévaloir le principe d’une compensation du côté de la Thessalie. Abeddin Pacha m’a laissé entendre que cette combinaison laisserait Metzovo à la Grèce, lui donnerait à peu près la ligne de l’Haliacmon et qu’à ces sacrifices s’ajouterait sans doute la cession de l’île de Psara. Du côté de l’Epire, la Grèce acquerrait avec Metzovo les districts grecs de la ligne de l’Arta (Tzoumerkse et Radovitza). À ce prix, Abeddin Pacha répondrait de la pacification de l’Albanie.

[Le Ministre ottoman demande le secret sur cette communication. Dispositions du Sultan. Conversation entre M. Goschen et Abeddin.]

189.

L’Amiral Jaurès, Ambassadeur de France à Madrid, à M. de Freycinet, Ministre des Affaires étrangères.

D. n° 55.
Madrid, 1er juillet 1880.
(Reçu : Cabinet, 3 juillet ; Dir pol., 4 juillet.)

Ainsi que j’ai eu l’honneur de l’annoncer hier par le télégraphe à Votre Excellence, la Conférence a terminé ses travaux ; car l’acceptation par l’Italie de la mise en vigueur immédiate de la convention, bien qu’encore réservée, ne fait aucun doute, et demain ou après-demain au plus tard la signature aura lieu[1].

Les résultats obtenus satisferont, je l’espère, Votre Excellence, surtout après les difficultés des premières séances dans lesquelles il semblait que la Conférence n’eût pour but que de faire disparaître notre convention de 1863.

  1. Elle eut lieu le 3 juillet. (Télégr. de Madrid du 3 juillet ; 1 h. 45 s.). Le texte de la Convention est publié dans les Documents diplomatiques français. Question de la Protection au Maroc, p. 271 et sq.