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LOI SUR L’ENSEIGNEMENT PRIMAIRE. 155 auteurs du moyen âge, comme on avait fait autrefois la philosophie servante de la théologie. M. DE PARIEU.—C’est du roman ! M. LE PRÉSIDENT.— N’interrompez pas, monsieur de Parieu ! M. LE PRÉSIDENT DU CONSEIL.— Ce dessein, très résolument suivi à cette époque, a été plus ou moins aidé par le gouvernement impérial : tantôt servi, tantôt combattu au gré des nécessités de sa politique. Il a reparu dans toute sa grandeur sous l’Assemblée de 1871. Il a même été sur le point de recevoir la consécration la plus complète et la plus éclatante qu’on ait jamais pu rêver pour lui de cette commission que présidait Mgr Dupanloup et qui a failli — elle l’aurait fait si elle avait vécu— remettre la nomination des instituteurs à une assemblée de pères de famille et de mères de famille, combinée de façon à y donner la pleine autorité au ministre du culte ; elle a aussi failli réaliser cet autre rêve des mêmes politiques, celui qui, de temps en temps, vient s’étaler à cette tribune, avec je ne sais quelle franchise un peu téméraire, cette idée si chère, messieurs, à quelques-uns d’entre vous, et qui, suivant vous, est la véritable formule de la liberté d’enseignement : l’État subventionnant de ses deniers les écoles privées et libres.

Un sénateur à droite.— Cela se passe comme cela en Angleterre et en Amérique. Cela n’est pas si scandaleux ! Un autre sénateur à droite.— Il y a même des collèges de jésuites subventionnés.

M. LE PRÉSIDENT DU CONSEIL.— L’Angleterre n’a pas de service d’enseignement public. Eh bien, arrivé à ce point culminant qu’il n’a pas franchi, le dessein cher aux auteurs de la loi de 1850 s’est trouvé tout à coup arrêté, et alors a commencé pour lui l’ère de la décadence ; alors sont venues les différentes mesures qui ont été proposées aux Chambres, et notamment cette loi relative à la constitution du Conseil Supérieur de l’Instruction publique, qui n’est pas autre chose, je le répète, que l’application à la haute direction de l’Université du principe de la sécularisation. Messieurs, en vous demandant de séculariser à son tour l’enseignement primaire, nous sommes donc fidèles à la grande tradition de notre société. Nous vous demandons, à vous, de