de notre histoire comme une sorte de mal chronique, à ce point qu’on pourrait annoncer à l’avance l’arrivée de ces vastes tempêtes sociales ?
« Oh ! il faut nous débarrasser du passé. Il faut refaire la France. » Hélas ! tel fut le cri qui, au lendemain de nos désastres, est sorti de toutes les poitrines. Pendant trois mois on a entendu ce cri sacré, illumination subite d’un peuple qui ne voulait pas périr. Ce cri, on ne l’entend plus. On n’entend plus parler aujourd’hui que de complots et d’intrigues dynastiques ; il n’est plus question que de savoir quel prétendant s’attribuera les débris de la patrie en péril. Il faut que cela cesse ; il faut écarter résolument ces scandaleuses convoitises et ne plus penser qu’à la France. Il faut se retourner vers les ignorants et les déshérités, et faire du suffrage universel, qui est la force par le nombre, le pouvoir éclairé par la raison. Il faut achever la Révolution.
Oui, quelque calomniés que soient aujourd’hui les hommes et les principes de la Révolution française, nous devons hautement les revendiquer, poursuivre notre œuvre, qui ne sera terminée que lorsque la Révolution sera accomplie (Applaudissements.) ; mais j’entends, Messieurs, par ce mot : la Révolution, la diffusion des principes de justice et de raison qui l’inspiraient et je repousse de toutes mes forces l’assimilation perfide, calculée de nos adversaires avec les entreprises de la violence. La Révolution a voulu garantir à tous la justice, l’égalité, la liberté ; elle proclamait le règne du travail, et voulait en assurer à tous les légitimes fruits ; mais elle a subi des retards, presque des éclipses. Les conquêtes matérielles nous sont restées en partie, mais les conséquences morales et politiques sont encore à venir pour les plus nombreux : les ouvriers et les paysans ; ces derniers, surtout, n’en ont retiré que des bénéfices matériels, précieux assurément, dignes de tous nos respects et de toute notre sollicitude, mais insuffisants toutefois à en faire de libres et complets citoyens.