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et de l’esprit public, de voir accomplir par d’autres mains que les siennes les réformes les plus éclatantes. (Applaudissements.)

Quant à moi, je m’emploierais parfaitement, je l’avoue, à cette tâche, sous un état politique dans lequel la République serait acceptée comme le gouvernement de droit ; car, contre le droit, il ne saurait surgir que des prétentions illégitimes, et il ne peut pas se faire qu’on nous oppose, pour l’abattre et le fouler aux pieds, ni un consentement surpris à l’ignorance et à la faiblesse, ni un coup d’État de prince, ni un complot de la rue.

C’est en ce sens qu’on a pu dire du droit républicain qu’il est au-dessus des attentats de la force et des caprices de la multitude. Si la République est le gouvernement de droit par excellence, est-ce que tous les partis ne peuvent pas s’y donner rendez-vous ? Est-ce que ce n’est pas le seul gouvernement où l’accès du pouvoir soit ouvert à tous ceux qui, sous l’œil de l’opinion publique, ont le mieux affirmé leurs talents et leurs vertus ? (Applaudissements.) Et dès lors, est-ce que nous ne pouvons pas nous tourner vers ceux qui ont professé des opinions contraires à la République, et leur dire : Ah ! vous voulez gouverner la République, vous voulez la fonder, eh bien ! nous ne vous demandons qu’une chose, c’est d’abord de la reconnaître. Mais une fois que vous l’aurez reconnue, nous admettrons parfaitement votre passage aux affaires. Car nous voulons présenter au pays ce spectacle de républicains de naissance qui restent dans l’opposition, en face de monarchistes convertis, et forcés, par la cohésion du parti républicain et la légitimité de la République, d’accomplir les réformes qu’elle demande. (Applaudissements.)

Ce ne serait pas là, Messieurs, un médiocre triomphe, et, dans tous les cas, la chose, puisque nous en sommes aux essais, mérite d’être tentée. Le jour où on entrerait dans cette méthode politique, la République ne serait pas en péril, même avec des