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doctrines littéraires, et qui possède l’avantage immense que ses fonctions et ses voyages lui ont procuré de parler et d’écrire avec élégance et facilité la langue qu’il est chargé de faire connaître. Je ne saurais trop vous engager, vous, Messieurs, qui vous proposez de suivre mon cours d’hindoustani, de suivre aussi celui de persan, car le persan est si intimement lié à la branche musulmane de l’hindoustani (l’urdu), qu’on ne peut la savoir à fond sans le secours du persan ; et, d’un autre côté, il est certain que la connaissance de l’urdu est très-utile pour l’intelligence du persan, du moins du persan de l’Inde, où se glissent presque toujours des expressions et des constructions indiennes. Mais si le persan est la clef de l’urdu, le sanscrit est la clef du hindi, qui est la branche hindoue de l’hindoustani. Je vous engage donc, Messieurs, à vous occuper aussi de cette langue antique, qui doit être professée dans cette même salle par un philologue déjà célèbre. J’ai assez parlé, dans d’autres circonstances, de l’utilité propre de l’hindoustani. Son importance s’accroîtra sans doute actuellement qu’on sentira plus que jamais la nécessité de l’étude des langues de l’Inde, et spécialement de celle que j’enseigne, et on en exigera sans doute plus sévèrement la connaissance pour les emplois civils et militaires.

Un habile orientaliste anglais, M. W. Nassau Lees, connu par ses savantes et précieuses publications arabes, a pris, il y a quelques mois, dans une brochure spéciale, la défense énergique des études orientales, que lui semblent menacer les réformes proposées par sir T. B. Macaulay et appuyées en dernier lieu par le Times, qui demande qu’on n’emploie plus dans l’Inde que les caractères latins et que l’anglais en soit désormais la langue officielle. Sa brochure, intitulée : « Instruction in the oriental languages considered », démontre une fois de plus que la connaissance des langues de l’Asie, et spécialement de l’hindoustani, est indispensable pour le service civil et militaire de l’Inde, et que c’est se faire une véritable illusion que de croire que l’anglais pourra être adopté avant longtemps assez généralement pour rendre inutile aux Européens l’étude des langues de l’Asie. Il se plaint du défaut d’entente qui a existé, à ce sujet, entre les autorités compétentes de l’Angleterre et de l’Inde ; enfin, il défend la cause de toutes les langues de l’Orient dans l’intérêt politique de l’Angleterre, et il demande qu’à l’imitation de la Russie et de l’Autriche, il soit fondé pour l’étude et l’enseignement des langues orientales, un collège oriental digne de la grande nation qui s’intitule Regina maris.