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ami. Il proposa, pour faire montre de sa propre sagesse, d’évoquer le démon familier de Plotin et le pressa d’y consentir. Plotin s’y prêta volontiers ; on se rendit donc pour l’évocation au temple d’Isis, le seul lieu que l’Égyptien eût trouvé pur dans la ville entière ; mais au moment où le prêtre ordonnait au démon de se montrer, ce fut un dieu qui parut et non un être du genre des démons. Aussi l’Égyptien s’écria-t-il : « Tu es heureux, Plotin ; ton démon familier n’est pas un génie d’un ordre inférieur, c’est un dieu. » Ils n’eurent pas, du reste, le loisir d’adresser la parole au dieu, ni même de le contempler longtemps ; car un ami qui assistait avec eux à l’évocation étouffa, — soit jalousie, soit émotion, — les oiseaux dont on lui avait confié la garde. Honoré ainsi de la familiarité d’un des démons les plus divins, il ne cessait de diriger vers lui son divin regard. C’est même pour cette raison qu’il a composé sur le démon de chaque homme un ouvrage où il s’efforce d’expliquer les différences de ces génies familiers. Amélius, qui était un sacrificateur zélé et se montrait assidu aux cérémonies religieuses les jours de fête et de nouvelle lune, le pria un jour de l’accompagner. « Ce n’est point à moi d’aller à eux, reprit Plotin, c’est à eux de venir à moi. » Quelle était sa pensée en prononçant ces fières paroles ? Nous n’avons pu le comprendre, et nous n’avons point osé l’interroger à ce sujet.

XI.

Sa perspicacité tenait du prodige : il démêlait avec une rare sagacité le caractère des personnes, découvrait les vols, et prédisait ce que serait un jour chacun de ceux qui le fréquentaient. Ainsi un collier de grand prix ayant été volé à une dame nommé Chioné,