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cure a tiré tout ce qu’il a dit sur ce sujet. Antisthène dit, dans la Succession des Philosophes, qu’il avait eu pour maîtres Annicéris et Denys le Logicien. Il admet pour principes d’action la joie et la tristesse, qu’il fait consister l’une dans la science, l’autre dans l’ignorance. Les véritables biens, selon lui, sont la prudence et la justice ; les maux sont les dispositions contraires ; quant au plaisir et à la douleur, ce sont des états intermédiaires entre le bien et le mal. Il supprime l’amitié, sous prétexte qu’on ne la rencontre ni chez les sages ni chez ceux qui ne le sont pas ; chez les derniers elle ne dure pas au delà de l’intérêt qui l’a fait naître ; d’un autre côté le sage se suffit à lui-même et n’a pas besoin d’amis. Il ne trouve pas raisonnable que le sage expose sa vie pour sa patrie, parce que ce serait là sacrifier la sagesse aux intérêts des insensés et que d’ailleurs la véritable patrie est le monde. Dans l’occasion le sage peut se permettre le vol, l’adultère, le sacrilége ; car aucune de ces actions n’est criminelle de sa nature, et c’est seulement pour contenir le vulgaire qu’on l’a habitué à les regarder comme telles. Le sage peut sans honte se livrer en public aux plaisirs de l’amour. Il faisait à ce sujet le raisonnement suivant : « Peut-on se servir d’une femme savante en tant qu’elle est savante ? — Oui. — Ne peut-on pas se servir aussi d’un enfant et d’un jeune homme en tant qu’ils sont savants ? — Oui. — On peut se servir également d’une belle femme en tant que belle, d’un bel enfant, d’un beau jeune homme en tant que beaux ? — Sans doute. — On peut s’en servir pour la fin en vue de laquelle ils sont beaux ? — Oui. — Or, ils peuvent servir aux plaisirs de l’amour. » Ce dernier point accordé, il ajoutait : « Si l’on a recours aux plaisirs de l’amour en tant qu’ils sont utiles, on ne commet