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le jeune homme, rebuté de ces façons, prit le parti de se retirer.

Il disoit que rien ne sied plus mal que l’orgueil, surtout aux jeunes gens, & qu’il ne suffit pas de retenir les phrases & les termes d’un bon discours ; mais qu’il faut s’appliquer à en saisir l’esprit, afin de ne pas le recevoir comme on avale un bouillon, ou quelque autre aliment. Il recommandait la bienséance aux jeunes gens dans leur démarche, leur air & leur habillement, & leur citait fréquemment ces vers d’Euripide sur Capanée.

Quoiqu’il eût de quoi vive, il ne s’enorgueillissait pas de sa fortune ; il n’avoit pas plus de vanité que n’en a un nécessiteux. Zénon soutenait que rien ne rend moins propre aux Sciences que la Poésie, & que le temps étoit de toutes les choses celle dont nous avons le plus besoin. Interrogé sur ce qu’est un ami, il dit que c’étoit un autre soi-même. On raconte qu’un esclave, qu’il punissait pour cause de vol, imputant cette mauvaise habitude à sa destinée, il répondit : Elle a aussi réglé que tu en serais puni. Il disoit que la beauté est l’agrément[1] de la voix ; d’autres veulent qu’il ait dit que la voix est l’agrément de la beauté. Le Domestique d’un de ses amis parut devant lui, tout meurtri de coups : Je vois, dit-il au Maître,

  1. Il y a dans le Grec, la fleur de la voix.