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pour les chefs du peuple et les magistrats, le second pour les orateurs, et le troisième pour les poètes, autant de classes de personnes qui avaient à se plaindre des censures de Socrate. Phavorin, au premier livre de ses Commentaires, dit que la harangue qu’on attribue à Polycrate contre ce philosophe est supposée, parce qu’il y est parlé des murs rebâtis par Conon, ce qui n’arriva que six ans après la mort de Socrate.

Voici quels furent les chefs d’accusation qui furent attestés par serment ; Phavorin dit qu’on les conserve encore aujourd’hui dans le temple de la mère des dieux : Mélitus, fils de Mélitus de Lampsaque, charge Socrate, natif d’Alopèce, fils de Sophronisque, des crimes suivants : Il viole la sainteté des lois, en niant l’existence des dieux reconnus par la ville, et en en mettant de nouveaux à leur place. Il corrompt aussi la jeunesse. Il ne peut expier ces crimes que par la mort. Lysias lui ayant récité une apologie qu’il avait faite pour lui : Mon ami, lui dit le philosophe, la pièce est bonne, mais elle ne me convient pas. En effet, le style en était plus propre à l’usage du barreau que sortable à la gravité d’un philosophe. Lysias, surpris d’entendre en même temps louer et rejeter son apologie, le pria de s’expliquer. Il ne serait pas impossible, répondit-il, que des habits et des souliers fussent bien faits, quoiqu’ils ne pussent me servir.

Juste Tibérien dit, dans sa Généalogie, que, pendant qu’on plaidait la cause de Socrate, Platon monta à la tribune et dit ces paroles : « Athéniens, quoique je sois le plus jeune de tous ceux qui se sont présentés pour parler dans cette occasion… ; » mais les juges se récrièrent là-dessus et lui imposèrent silence. Socrate fut donc condamné à la pluralité de deux cent quatre-vingt-une voix ; mais comme les juges délibéraient pour savoir s’il fallait le condamner au supplice ou à une amende, il se taxa lui-même à vingt-cinq drachmes, quoique Eubulide prétende qu’il promit d’en payer cent ;