Page:Diogène Laërce - Vies, édition Lefèvre,1840.djvu/456

Cette page n’a pas encore été corrigée

l’équivalence des raisons contraires, mais qu’il s’en tenait aux apparences; ce qu’Ænésidème répète dans son traité contre la Philosophie, et dans celui de la recherche. Zeuxis, ami d’Ænésidème, dans son livre des Deux sortes de raisons, Antiochus de Laodicée, et Apellas dans son traité d’Agrippa, ne posent aussi d’autre système que celui des seules apparences. Ainsi donc les pyrrhoniens admettent pour caractère de vérité ce que les objets présentent à la vue, selon ce qu’en dit Ænésidème.

Epicure a été du même sentiment, et Démocrite déclare qu’il ne connaît rien aux apparences, qu’elles ne sont point toutes réelles, et qu’il y en a même qui n’existent pas.

Les dogmatistes dont là-dessus une difficulté aux pyrrhoniens, prise de ce que les mêmes apparences n’excitent pas les mêmes idées. Par exemple, une tour peut paraître ronde et carrée. Si donc un pyrrhonien ne décide sur aucune de ces apparences, il demeure sans agir; et s’il se détermine pour l’une ou l’autre, il ne donne pas aux apparences une force égale. Ils répondent que, quand les apparences excitent des idées différentes, ils disent cela même qu’il y a diverses apparences, et que c’est pour cela qu’ils font profession de n’admettre que ce qui paraît.

Quant à la fin qu’il faut se proposer, les pyrrhoniens veulent que ce soit la tranquillité d’esprit qui suit la suspension du jugement, à peu près comme l’ombre accompagne un corps, s’expriment Timon et Ænésidème. Ils avancent que les choses qui dépendent de nous ne sont pas un sujet de choix ou d’aversion, excepté celles qui excèdent notre pouvoir, et auxquelles nous sommes soumis par une nécessité que nous ne pouvons éviter, comme d’avoir faim et soif, ou de sentir de la douleur; choses contre lesquelles la raison ne peut rien. Sur ce que les dogmatistes leur demandent comment un sceptique peut vivre sans se dispenser, par exemple, d’obéir si on lui ordonnait de tuer son père, ils répondent qu’ils ne savent pas comment un dogmatiste pourrait vivre en s’abstenant