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SOLON.

des vents, que la foudre et les éclairs éclatent, et causent un fracas horrible, de même on voit souvent des villes s’écrouler sous la puissance des grands, et la liberté d’un peuple dégénérer en dur esclavage. »

Enfin Pisistrate ayant usurpé la souveraineté, jamais Solon ne put se résoudre à plier sous le joug ; il posa ses armes devant la cour du sénat, en s’écriant : « Chère patrie, je te quitte avec le témoignage de t’avoir servie par mes conseils et ma conduite. » Il s’embarqua pour l’Égypte, d’où il passa en Chypre et de là à la cour de Crésus. Ce fameux prince lui demanda qui était celui qu’il estimait heureux : « Telles l’Athénien, dit-il, Cleobis et Biton; » à quoi il ajouta d’autres choses qu’on rapporte communément. On raconte aussi que Crésus, assis sur son trône et revêtu de ses ornements royaux, avec toute la pompe imaginable, lui demanda s’il avait jamais vu un spectacle plus beau : « Oui répondit-il, c’est celui des coqs, des faisans et des paons ; car ces animaux tiennent leur éclat de la nature, et sont parés de mille beautés. » Ayant pris congé de Crésus, il se rendit en Cilicie, où il bâtit une ville qu’il appela Solos de son nom. Il la peupla de quelques Athéniens, qui, avec le temps, ayant corrompu leur langue, furent dits faire des solécismes; on les appela les habitants de Solos, au lieu que ceux qui portant ce nom en Chypre furent nommés Soliens.

Solon, informé que Pisistrate se maintenant dans son usurpation, écrivit aux Athéniens en ces termes :

« S’il vous arrive des malheurs dignes des fautes que vous avez faites, ne soyez pas assez injustes pour en accuser les dieux. C’est vous-mêmes qui, en protégeant ceux qui vous font souffrir une dure servitude, les avez agrandis et légers; vous voulez faire les gens rusés, et, dans le fond, vous êtes stupides et légers; vous prêtez tous l’oreille aux discours flatteurs de cet homme, et pas un de vous ne fait attention au but qu’il se propose. »

Pisistrate de son côté, lorsque Solon se retira lui écrivit cette lettre :