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ARCÉSILAS.

Crantor admirait Homère et Euripide plus que tous les autres poëtes, et disait qu’il est fort difficile d’écrire dans le genre propre et d’exciter en même temps la terreur et la pitié, citant là-dessus ce vers de la tragédie de Bellérophon :

O malheur! Quel malheur! que de maux doivent souffrir les mortels!

Antagoras rapport aussi ces vers d’un poète sur l’amour, comme s’ils avaient été faits par Crantor :

Mon esprit incertain ne sait que décider. Amour, dis-moi quelle est ton origine? Es-tu le premier de ces dieux que l’ancien Érèbe et la majestueuse Nuit engendrèrent sous les flots de l’océan? T’appellerai-je le fils de Venus, de l’Air ou de la Terre? Tu apportes aux hommes des biens et des maux; la nature t’a donné une double forme.

Ce philosophe avait un génie propre à inventer des termes. Il disait que la voix des acteurs tragiques n’était point rabotée et sentait l’écorce; que les vers d’un certain poëte étaient pleins d’étoupes, et que les questions de Théophraste étaient écrites sur des écailles d’huître. On fait cas d’un ouvrage qu’il a écrit sur le deuil. Il mourut d’hydropisie, avant Polémon et Cratès. Voici l’épitaphe que je lui ai faite :

Crantor, tu meurs du plus triste des maux, et tu descends dans les gouffres de Pluton. Tu te reposes heureusement dans ce séjour, mais tu laisses ton école veuve, aussi bien que ta patrie.



ARCÉSILAS.

Arcésilas, fils de Seuthus, selon Apollodore, dans ses Chroniques, livre III, naquit à Pitane, ville de l’Éolie. Ce philosophe, fonda la moyenne académie et admit le principe du doute, à cause des contradictions qui se rencontrent dans les opinions. Il fut le premier qui disputa