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PLATON.

beaux ; car un chien parait beau à un chien, et il en est de même du bœuf, de l’âne et du porc.

Alcime parle de tout cela et d’autres choses semblables dans ses quatre livres, en faisant remarquer sur combien de choses Platon a profité des ouvrages d’Épicharme, et il n’ignorait pas lui-même le profit qu’on en pouvait faire ; cela paraît parce qu’il dit sur ceux qui pourraient dans la suite marcher sur ses traces. « Je crois et je prévois même qu’on se souviendra de mes discours, que quelqu’un mettra mes vers en prose, et qu’après les avoir embellis d’expressions fleuries, il s’en prévaudra et surpassera les autres. »

Sophron le comique est encore un auteur dont Platon parait avoir fait usage, en se servant pour les mœurs des préceptes qu’il y trouva ; ces livres avaient été jusqu’alors inconnus à Athènes, et on dit que lorsque Platon mourut il les avait sous son chevet.

Ce philosophe alla trois fois de Grèce en Sicile. La curiosité de voir l’île et les soupiraux du mont Etna fut le motif de son premier voyage. Denys le tyran, fils d’Hermocrate, ayant souhaité d’avoir un entretien avec lui, Platon parla de la tyrannie, et dit qu’une chose qui n’était avantageuse qu’à celui qui en jouissait ne pouvait pas passer pour la meilleure, à moins qu’il ne surpassât eu .même temps les autres par sa vertu. Denys irrité lui dit que c’étaient là des discours de vieillards ; Platon lui répondit que les siens étaient ceux des tyrans ; et Denys, se livrant à sa colère, forma le dessein de le faire mourir. Il se laissa pourtant fléchir par les prières de Dion et d’Aristomène, et se contenta de le livrer à Polide, envoyé de Lacédémone à sa cour, afin qu’il le vendit à tel prix qu’il voudrait. Celui-ci le mena à Égine, où il le vendit comme un esclave. Alors Charmander, fils de Charmandride, accusa Platon de crime capital, en vertu d’une loi du pays qui condamnait à mort sans forme de procès