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DIODORE DE SICILE.

étant fondues en été par la chaleur du soleil, occasionnent un grand dégel, et donnent naissance à des nuages épais, accumulés dans les régions supérieures par suite des vapeurs abondantes qui s’élèvent. Ces nuages sont emportés par les vents étésiens et viennent s’abattre sur les montagnes de l’Éthiopie, qui passent pour les plus élevées de la terre. Pressés avec violence contre ces montagnes, ils produisent des pluies énormes qui font gonfler le Nil, principalement pendant la période des vents étésiens. Mais cette opinion est également facile à réfuter, quand on examine avec attention les moments de la crue. En effet, le Nil commence à croître au solstice d’été, époque où les vents étésiens ne soufflent point ; puis il décroît à l’équinoxe d’automne, alors que les vents étésiens ont déjà cessé de souffler. C’est ainsi qu’une opinion doit être confirmée par l’expérience, et recevoir une démonstration avant de pouvoir être admise comme vraie. J’omets de faire valoir une autre raison, c’est que les vents étésiens soufflent tout autant du nord que du couchant[1] ; car non-seulement les vents septentrionaux et de l’Ourse, mais encore les argestes, qui soufflent du couchant d’été, sont compris sous la dénomination commune d’étésiens. Quant à l’assertion que les plus hautes montagnes sont en Éthiopie, elle n’est ni démontrée, ni mise en aucune façon hors de doute. Éphore a essayé de donner une explication plus neuve, mais n’atteint pas davantage la vérité. Il avance que toute l’Égypte étant une terre d’alluvion, et d’une nature spongieuse, présente dans le sol de larges et profondes crevasses, dans lesquelles l’eau s’infiltre et demeure absorbée pendant l’hiver ; mais qu’en été cette eau exsude de toutes parts, comme une sueur, et fait ainsi croître

    passage. En effet, περὶ τὰς τροπὰς μένειν πεπηγός ne veut pas dire « que la neige reste sous forme compacte jusque au solstice d’été. » D’abord, περὶ n’a point, autant que je sache, la signification de μέχρι ; ensuite τροπαί, terme général, peut signifier solstice d’hiver aussi bien que solstice d’été. Et le passage suivant ἐν δὲ τῷ θέρει…) prouve qu’il est ici réellement question du solstice d’hiver. C’est aussi dans ce sens que je l’ai interprété.

  1. C’est sans doute par inadvertance que Miot a traduit « que les vents étésiens ne soufflent pas plus du nord que du couchant. » Car ceci ne concorde guère avec ce qui suit immédiatement.