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DIODORE DE SICILE.

faire construire ce canal ; Darius, roi de Perse, le continua, mais il le laissa inachevé, car il avait appris que s’il perçait le détroit il ferait inonder toute l’Égypte. On lui avait en effet démontré, que le niveau de la mer Rouge est plus élevé que le sol d’Égypte[1]. Plus tard, Ptolémée II y mit la dernière main, et fit construire une écluse dans l’endroit le plus favorable ; on l’ouvre quand on veut traverser le canal, et on la ferme ensuite exactement. Ce canal est appelé fleuve de Ptolémée. À son embouchure est située la ville d’Arsinoë.

XXXIV. Le Delta, dont la configuration ressemble à celle de la Sicile, a, pour chacun des côtés, une longueur de cinq cent cinquante stades ; sa base, qui est baignée par la mer, a mille trois cents stades. Cette île est traversée par un grand nombre de canaux, ouvrages de l’homme, qui rendent ce pays le plus beau de l’Égypte.

Le terrain alluvionnaire du Nil est bien arrosé ; il produit des fruits abondants et variés[2]. Le Nil y dépose annuellement, après ses crues, du nouveau limon, et les habitants peuvent facilement arroser toute l’île à l’aide d’une machine construite par Archimède, de Syracuse, laquelle, pour sa forme, porte le nom de limaçon[3]. Les eaux du Nil, coulant très-lentement, charrient avec elles beaucoup de terre, et forment, dans les endroits bas, des marais extrêmement fertiles. On y voit naître des racines de diverses saveurs, des fruits et des tiges d’une nature particu-

  1. Ici, comme dans beaucoup d’autres circonstances, les recherches des modernes sont venues confirmer l’opinion des anciens. En effet, l’élévation des eaux de la mer Rouge au-dessus du niveau de la Méditerranée a été trouvée, par une opération exacte, de cinq toises et demie. (Voy. Mémoire sur le canal de Suez, par M. le Père.)
  2. Les plantes que l’on rencontre encore aujourd’hui dans les endroits marécageux de la Basse-Égypte sont : Nymphœa lotus, nymphœa cœrula, cyperus papyrus, cyperus articulatus, cyperus alopecuroïdes, calamus aromaticus, scirpus mucronatus, scirpus fistulosus, arum colocasia, panicum colonum, panicum fluitanis. Les fruits de plusieurs de ces plantes (N. lotus, N. cœrulea, P. fluitans, P. colonum), pouvaient, en effet, servir à faire du pain. D’autres (C. aromaticus) pouvaient fournir des boissons aromatiques ou mucilagineuses, utiles dans certaines maladies.
  3. Vis d’Archimède.